Le gaz naturel n’est pas une énergie de transition

MONTRÉAL – Les conclusions du mémoire de Greenpeace Canada ‘GNL Québec : à quel prix’, démontre l’incohérence du projet GNL/Gazoduq et sa contribution directe à l’augmentation des émissions de GES à l’échelle mondiale. Le mémoire de Greenpeace porte sur les impacts climatiques globaux du projet et met l’emphase sur la nécessité de la tenue d’une évaluation intégrale des émissions du projet en amont et en aval – aspect négligé jusqu’à présent par le promoteur et le gouvernement.

Les retombées du  mémoire 

Le mémoire situe les émissions mondiales du projet entre 56 et 83 millions de tonnes d’équivalents CO2 (MtCO2e) par an dépendamment du lieu et de l’utilisation finale du gaz. Ceci équivaut la pollution de 12 à 18 millions de nouveaux véhicules légers sur les routes. En comparaison, les émissions totales du Québec étaient de 78,6 MtCO2e en 2017. De plus, les émissions de GES émises au Canada en amont du projet (du puits jusqu’au terminal) seraient de l’ordre de 13 MtCO2e par an. Ceci constitue pratiquement le double du taux estimé par le producteur. D’une part, si tout le gaz destiné à la production de chaleur industrielle en Europe est effectivement produit, alors le projet générerait des émissions mondiales de l’ordre de 1,4 milliard de tonnes (Gt) de CO2e sur 25 ans et de 2,8 GtCO2e sur 50 ans. Pareillement, si le gaz est entièrement utilisé pour produire de l’électricité en Chine, alors GNL/Gazoduq émettra jusqu’à 2,1 GtCO2e et 4,2 GtCO2e sur 25 et 50 ans respectivement. Cette contextualisation du projet GNL/Gazoduq permet de le comparer aux études et projections existantes pour le marché des énergies fossiles et celui du gaz spécifiquement, et ce à la lueur des objectifs climatiques du Québec, du Canada et de l’Accord de Paris. 

Greenpeace a aussi fait passer au projet deux tests climatiques qu’il a échoué. Le premier test climat effectué dans le cadre du mémoire démontre que GNL/Gazoduq est incompatible avec une transition énergétique mondiale économiquement optimale qui permettrait de limiter le réchauffement à 2°C ou moins. Aussi, le second test climat compare les émissions de GES hypothétiques du projet proposé aux trajectoires que devraient suivre les émissions de GES dans le cadre de scénarios de décarbonisation rapide au Canada. Ce test démontre que GNL/Gazoduq faciliterait une croissance des émissions puisqu’il encourage le développement et la production d’un nouveau projet pollueur. En effet, s’il se réalise, ce projet nous éloignerait  de la trajectoire de décarbonisation globale qui est nécessaire pour effectuer une transition qui respecterait les objectifs de l’Accord de Paris et les principes d’une relance juste et verte.

Au delà des chiffres, Greenpeace tient à réitérer :

  • que l’opposition grandissante et élargie (autant de la part de la jeunesse que d’autres voix professionnelles québécoises),  signifie bien qu’il y a un manque d’acceptabilité sociale flagrant et rappelle par ailleurs que les effets psychosociaux de ce projet doivent être pris en compte.  De surcroit, le concensus parmi les Québécois.es est clair : 83% veulent que le gouvernement en fasse autant ou plus pour lutter contre les changements climatiques et pour protéger l’environnement.
  • qu’il est essentiel d’évaluer le projet GNL/Gazoduq dans son ensemble afin de déterminer tous les impacts liés au projet incluant : la production du gaz dans l’Ouest canadien, le transport, la construction du gazoduc et de l’usine de liquéfaction ainsi que, le terminal méthanier et enfin le transport maritime et la combustion finale du gaz. 
  • que le marché européen – cible principale du projet GNL/Gazoduq –  compte, selon la déclaration du Parlement Européen, baisser d’au moins 60% ses GES pour 2030 (par rapport à 1990) ce qui implique une décroissance de la consommation de gaz. Qui plus est, d’après le scénario le plus conservateur de Développement durable (SDD) de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la demande de gaz diminuera de 25,6% d’ici 2030.  En plus, “l’effet rebond” contribuerait à l’augmentation des émissions.

Ainsi, Greenpeace fait les recommandations principales suivantes : 

  • Sur l’évaluation, Greenpeace recommande :
    • l’évaluation intégrale des composantes de ce projet comme étant un seul projet et non deux distincts. (Autrement dit, Greenpeace désapprouve la division du projet de GNL Québec et de Gazoduq en deux projets distincts dans le cadre des évaluations environnementales alors qu’il s’agit d’un seul et même projet.);
    • une évaluation intégrale et globale de toutes les émissions de gaz à effet de serre du projet en amont et en aval et une évaluation de sa compatibilité avec l’Accord de Paris;
  • Sur les bélugas, Greenpeace recommande (que/qu’) :
    • l’application du principe de précaution par les gouvernements.
    • les gouvernements du Québec et du Canada insèrent les conclusions et mises en garde émises par les scientifiques spécialisés sur la situation, la protection et la qualité de vie acoustique des bélugas; 
    • les gouvernements du Québec et du Canada légifèrent et fassent du Fjord du Saguenay un refuge acoustique;
    • qu’aucun projet susceptible de modifier les caractéristiques et/ou les qualités acoustiques ou autres de l’habitat essentiel du béluga ne soient acceptés avant que les projets de recherche en cours par UQO-GREMM et Pêches et Océans ne soient complétés;
    • les gouvernements du Québec et du Canada examinent les impacts de l’augmentation de la navigation dans l’habitat du béluga du Saint-Laurent en tenant compte des effets cumulatifs de l’ensemble des autres pressions anthropiques potentiellement nuisibles;
    • avant toute décision du gouvernement du Québec que la question du transport maritime soit  impérativement évaluée d’un point de vue global où l’ensemble des nuisances actuelles et potentielles seront considérées et permettront de déterminer les effets cumulatifs des différents projets en cours, incluant Énergie Saguenay.
    • les gouvernements mettent en place un moratoire sur l’augmentation du trafic maritime dans le Saguenay formulée par les chercheurs de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) et du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM).

En conclusion, Greenpeace rappelle que le gaz n’est pas une énergie de transition et rejette le projet GNL/Gazoduq dans sa totalité. « Ce projet est totalement incompatible avec l’Accord de Paris dont l’objectif est de limiter le réchauffement planétaire  à 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels. Autoriser ce projet équivaudrait à abandonner la lutte contre les changements climatiques. En 2020, le Québec et la planète méritent mieux qu’un projet de gaz fossile qui menace un climat fragile et des bélugas en voie de disparition. L’heure n’est plus à l’ajout d’infrastructures de combustibles qui vont totalement à l’encontre des principes de la relance juste, verte et inclusive dont nous avons besoin. Ce projet n’a tout simplement pas lieu d’être. » précise Patrick Bonin, Responsable de la campagne Climat-Énergie.

Greenpeace Canada participe à la deuxième série de consultations du BAPE sur le projet Énergie Saguenay (communément appelé ‘GNL Québec’) le 27 Octobre 2020. 

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Version abrégée du mémoire.

Version intégrale.

Pour plus d’informations, veuillez contacter: Loujain Kurdi, Conseillère aux communications, Greenpeace Canada, +1 514-577-6657, [email protected]